Les élections communales, si elles ont lieu le 04 février 2018, risquent de réserver bien de surprises aux partis politiques. Les résultats qui seront issus du scrutin détermineront d’avance ceux des élections législatives de 2019 et de la présidentielle de 2020. Voilà pourquoi la plupart des formations politiques ne lésinent pas sur les moyens et les stratégies pour avoir le maximum des conseillers. Même en usant des pires !
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Contrairement aux précédentes alliances pour les présidentielles de 2010, cette fois-ci, c’est le terrain (parfois régionaliste et communautariste) qui a commandé. L’alliance RPG Arc-en-ciel conduite par le parti au pouvoir a ainsi réussi à calmer les ardeurs des uns et des autres. Si au départ le RPG AEC ne souhaitait pas du tout avoir des têtes de listes (pour éviter, dit-on, des frustrations), dans la commune de Dixinn elle a abdiqué. Aboubacar Soumah (qui n’avait pas été compris par le parti l’UFDG lorsqu’il voulait être président de la délégation spéciale) a été choisi pour conduire la liste du parti au pouvoir. Il aura fort à faire face au candidat de la coalition UFDG-UDG ci-devant rejeton d’Elhadj Mamadou Sylla, président du parti UDG.
Dans cette élection communale, la grande bataille n’est autre que le contrôle de Conakry. Le RPG AEC, l’UFDG et l’UFR et alliés souhaiteraient chacun rafler au moins trois communes sur les cinq pour être sûr de présider le Haut Conseil Régional. A ce niveau, ce sont les alliances fortes scellées par-ci et par-là qui permettront au plus fin stratège de l’emporter. Le retrait de la candidature de Mouctar Diallo, président du parti NFD, pour briguer la commune de Ratoma n’est pas, non plus, étranger à ces jeux d’alliance. Il a fini par comprendre qu’il partait perdant face à son allié naturel qu’est le parti UFDG. Reste à savoir à qui profitera ce revirement du président du parti NFD.
L’autre aspect à prendre en compte, et qui n’est pas les moindres, c’est la participation des candidats indépendants et des « perturbateurs politiques » dans cette élection. Que ça soit à Conakry ou à l’intérieur du pays, nombre de listes indépendantes sont soutenues par des organisations de la société civile. Celles-ci argumentent bien auprès des populations qu’il ne s’agit pas de voter pour un parti politique mais pour un candidat capable de proposer des solutions pour le développement des communes rurales et urbaines. Un message qui n’arrange pas du tout les traditionnels partis politiques et leurs candidats qui, parfois en manque de popularité à la base, font appel au leader politique pour battre campagne à leur place.
Il sera difficile cette fois-ci qu’Alpha Condé par exemple parvienne à convaincre des électeurs de Kankan de voter pour un candidat du RPG AE ci ce dernier n’est pas bien connu et surtout considéré comme étant quelqu’un capable de servir le Nabaya. Idem pour Cellou Dalein Diallo, Sidya Touré, Lansana Kouyaté etc. Le RPG AEC qui avait voulu aller sans tête de liste a vite changé de stratégie. Dans un autre registre, ceux qu’on qualifie à tort ou à raison de « perturbateurs politiques » de la trempe de Bah Oury, ancien vice-président exclu du parti UFDG, vont jouer les troubles fêtes dans cette élection. En soutenant des listes à Matoto, Ratoma, Dubreka et Dixinn, pour le « Renouveau », Bah Oury cherche à mettre des bâtons dans les roues des candidats du parti qu’il a fondé. Ça ressemble à de l’autodestruction politique. Mais il y a d’autres enjeux derrière toutes ces alliances.
Le fait que le parti Bloc Libéral conduise une liste composée des partis UFDG, UFR, BL dans la commune rurale de Koundou relève un peu de la stratégie de partis politiques qui ne se sentent forts que dans les localités d’origine de leurs leaders. La meilleure stratégie aurait été de procéder à l’inverse. Le BL aurait bien pu soutenir une liste de l’UFDG à Koundou et l’UFDG une du BL à Popodara, en soutenant naturellement des candidats connus et reconnus dans les différentes circonscriptions électorales. C’est la meilleure pratique de la démocratie à la base. On aime souvent rappeler que le Bloc Africain de Guinée (BAG) était mieux implanté en Haute Guinée qu’en Moyenne Guinée. Le PDG RDA aussi avait beaucoup de militants de premières à Beyla qu’à Faranah, ville natale de feu Sékou Touré.
La stratégie qui consiste à désigner des candidats Peuls au Foutah, Malinké en Haute Guinée, Soussou en Basse Guinée, Forestier en Guinée Forestière, adoptée par certaines formations politiques, est un mauvais exemple pour la démocratie guinéenne. Au lieu de parvenir à unir les guinéens dans leurs différences, l’élection communale du 04 février 2018, pourrait bien creuser davantage le fossé du communautarisme et de l’ethno-stratégie politique. Même si Amadou Damaro Camara, président du Groupe Parlementaire RPG AEC jubile en déclarant que les communales sont des élections entre cousins et voisins. Nos politiques sont en train de préparer de mauvais ingrédients pour les législatives de 2019 et la présidentielle de 2020. La Guinée est loin de sortir du bout du tunnel.
Azoca Bah