(Le Pays-Burkina Faso)-Héritier littéraire de feu Williams Sassine, son compatriote, l’écrivain Tierno Monenembo, évoquant son pays, la Guinée, aime à dire que c’est « un pays halluciné où rien ne se dit ni ne se fait comme ailleurs ».
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Il convient donc d’être prudent dès qu’on parle de ce pays, de surcroît quand on touche à la scène politique guinéenne. Car, elle ressemble fort à un théâtre comique.
Après un bras de fer mouvementé entre le pouvoir et l’opposition, autour de la révision du fichier électoral, le président Condé semble lâcher du lest. Désormais, il accepte de prendre en compte et de satisfaire l’une des exigences majeures de l’opposition. Certes, le président Condé se refusait jusque-là de céder, pour ne pas donner au camp adverse le sentiment d’avoir perdu la face.
Mais d’ores et déjà, et qu’importent les calculs politiques qui se cachent derrière la souplesse actuelle de Condé, la Guinée s’achemine vers une forme d’apaisement politique et social.
Ici, de manière constante, le jeu politique est placé sous le signe de l’affrontement et non du consensus. C’est pourquoi, il faut à la Guinée, un corps politique nouveau, pour faire de la bonne politique, au sens athénien (Kalôs politeuesthai). Certes, le processus démocratique menant à l’instauration d’un Etat de droit est en cours ; mais à l’heure actuelle, les acteurs politiques guinéens et la société civile peinent à le faire aboutir.
Et, très vite, la violence latente menace, à chaque instant, de transformer ce processus en chaos généralisé.
L’opposition a raison d’exiger effectivement l’établissement d’une vraie liste des électeurs guinéens, et qui transcende les clivages ethniques et partisans. Car, si le fichier électoral est mal élaboré, truffé d’erreurs et objet de manœuvres diverses, on aboutira, après les élections législatives, à une grave crise post-électorale. Il ne faudrait surtout pas que, le jour des élections, un bon nombre de Guinéens se retrouvent sans carte d’électeurs, donc victimes d’un déni de citoyenneté. Souvenons-nous de la bataille politique et syndicale, au Bénin, lors des dernières élections présidentielles, autour de la liste électorale permanente informatisée (LEPI).
A l’arrivée, le régime sortant de Yayi Boni avait réussi à « barbouzer » la liste, faisant d’un grand nombre de Béninois, des citoyens-parias dans leur propre pays.
En Guinée, on semble accorder trop d’importance au choix de l’opérateur sud-africain, un choix domestique et arbitraire, au détriment d’un choix rationnel fait, par exemple, par une structure compétente comme la CENI. Mais, en réalité, les tensions et la méfiance actuelles entre Condé et l’opposition sont d’abord de nature politique avant d’être technique. Cette remise en cause du choix de l’opérateur sud-africain par l’opposition ne doit pas « tuer », mais favoriser le dialogue entre les deux camps. Le peuple guinéen a le droit de rêver à des élections libres, propres, justes et fiables, vraiment démocratiques.
Reconnaissons au président Condé sa volonté politique manifeste qui consiste à indiquer une nouvelle voie au peuple guinéen. Il semble enfin, avoir compris que, le respect de l’opposition est un sentiment fondateur du politique. Et, il ne doit pas renoncer à prendre de nouvelles initiatives pour décrisper le climat politique social. Si le président Condé réussit à relever ce défi, il permettra aux Guinéens, entre eux, de s’inventer un autre avenir et un autre destin politiques. En ce moment, lui, que ses partisans surnomment affectueusement Mandela, se sentira fier de faire partager cette vision politique originale du héros de la lutte anti-apartheid au peuple de Guinée : « Nous sommes un seul peuple, marchant ensemble vers l’avenir ».