Quand l’absence de mémoire collective perpétue la mainmise du système criminel sur notre pays !

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CONAKRY,26 NOVEMBRE 2013-La fin des années 50 a vue l’émergence des mouvements de lutte pour la décolonisation de l’Afrique. Dans la Guinée Française, des partis politiques furent créés avec des objectifs allant dans le sens de contribuer à l’accession du pays à la souveraineté nationale de la colonie Guinée qui fut créée par les soins de la puissance coloniale. La future nation gardera la configuration frontalière ave  quatre régions : la Foret, la Haute Guinée, le Fouta-Djalon et la Basse Côte.

 

Chacune de ces régions avait sa spécificité. La société guinéenne actuelle est la résultante des quatre civilisations marquées dans leur ensemble par le fait colonial. La lutte pour l’indépendance a ainsi été différemment influencée par l’héritage socioculturel de chacune des régions à travers les méthodes utilisées par les uns et les autres.

Sékou Touré, Lansana Conté, Dadis Camara et Sékouba Konaté ont successivement laissé leurs traces à ce que l’on peut appeler l’édifice commun bâti de destruction des valeurs morales et de la promotion des tares. Condé Alpha ne pouvait pas trouver mieux.

C’est malheureusement au cours de cette période qui a vu la naissance du jeune Etat que le PDG – RDA qui avait organisé des pogromes entre peulhs et soussous entre les populations de Conakry ainsi que de la même violence ciblée, a pris le dessus instituant le système criminel qui sévit dans notre pays depuis son accession à l’indépendance en 1958. Machiavélique, ce système a réussi à endormir la mémoire collective des guinéens. Ce qui lui a permis jusqu’au jour d’aujourd’hui de triompher à chaque fois qu’il s’est retrouvé en difficulté. Il passe par toutes sortes de méthodes et tous les moyens sont bons pour renforcer sa mainmise sur le pays. Pour y parvenir, il a trouvé un moyen très sûr et efficace dans un pays où la mémoire collective n’a aucune incidence sur la vie publique, c’est la culture de l’impunité.

Quand en 1984, le Tout Puissant mit fin aux jours du régime tyrannique du PDG, il y eut une accalmie qui permit l’espoir. Après l’euphorie ayant suivi la disparition du tyran et surtout suite à la victoire de la faction modérée dans le conflit interne du système en 1985. Mais plus tenace et aguerri par plus de 26 ans de violations des droits les plus élémentaires de l’Homme et la violence politique, le système revient petit à petit à travers le CMRN lui – même et finit par triompher encore.

Il est regrettable de remarquer que l’histoire de la Guinée indépendante reste toujours dominée par ce système criminel qui s’est enraciné. Mais  il est plus inquiétant de constater sa force se consolider de jour en jour, aidé en cela par les opportunismes et  l’inconsistance de la classe politique de notre pays. Voyons comment cette politique politicienne et ce non respect des principes de droit ont contribué à perpétuer le triomphe de cette machine répressive dans notre pays.

En décembre 2008, le général Lansana Conté meurt. L’année d’avant avait vu le soulèvement populaire de janvier et février, soulèvements qui furent matés par des soldats qui massacrèrent et  violèrent beaucoup de nos compatriotes. Ce sont ces soldats qui prirent le pouvoir sous le sigle CNDD et qui seront applaudis comme des libérateurs. Un an après, ce sont les évènements tragiques au stade où les forces vives avaient invité leurs supporteurs à manifester pacifiquement pour réclamer des élections libres. La communauté internationale impose des sanctions contre ses membres dirigeants jusqu’au moment où il y a eu la tentative d’assassinat contre le capitaine Dadis. Sékouba Konaté lui succède et est accueilli de nouveau comme un autre libérateur. Nous savons tous comment il a géré la transition.

Aujourd’hui, au lieu de demander des comptes sur leur gestion et sur atteintes inqualifiables infligées à la dignité de leurs concitoyens, ils sont célébrés. Si, des hommes politiques de tous bords trouvent normal d’aller à Ouagadougou saluer Dadis Camara, foulant la mémoire des infortunés du 28 septembre 2009 et de leurs familles, l’attitude irresponsable du chef de l’Etat doit être dénoncée. Lors de sa campagne du second tour des élections présidentielles de 2010 et après avoir au paravent accusé collectivement les forestiers des massacres et des viols perpétrés au stade, le rescapé au premier tour décide de marchander le retour éventuel de Dadis contre leur soutien à sa candidature. Maintenant au pouvoir, le président, refusant de jouer son rôle de garant de la légalité et du droit en Guinée, se livre à une campagne de chantage et d’intimidation à l’endroit de ces populations, au lieu de faire traduire tout simplement les individus présumés coupables des crimes contre l’humanité qui sont Dadis Camara, Pivi Coplan, Tumba Diakité, Tiegboro Camara, etc. en justice. Les missions assignées à Pivi et à Tiegboro en sont une illustration. En Basse Côte, les Fodé Bangoura, Faciné Touré, Kiridi Bangoura, El hadji Mamadou Sylla et autres ont pris les menaces de vengeance du leader du RPG au sérieux se rendant pieds et mains liés pour lui offrir encore leurs services crapuleux avérés sous le régime de Lansana Conté.

Monsieur Alpha Condé continue de tromper même les représentants des organisations des droits de l’Homme et de la communauté internationale arguant que rendre justice aux victimes conduirait à l’éclatement du pays. Ces agissements confortent les criminels. Les crimes commis par Sékou Touré ne doivent pas être imputés à tous les malinkés, Ceux de Lansana Conté à tous les Soussous et ceux de Dadis à tous les forestiers.  Nous devons lutter contre l’impunité sans tomber dans l’amalgame qui ferait l’affaire de Sékou Touré, Lansana Conté, Dadis Camara, Sékouba Konaté et Alpha Condé. Les exactions qu’ils ont fait commettre n’incombent qu’à eux personnellement et non à leurs ethnies derrière lesquelles, ils tentent de se cacher. C’est un piège que nous devons absolument éviter pour pouvoir mettre fin à l’impunité.

Tout le monde sait comment Alpha Condé a été déclaré président. Nous avons fermé les yeux sur la façon dont il a pris le pouvoir et cette démission de notre part lui a conféré une légitimité. En moyen de trois ans de pouvoir, il y a des dizaines de morts par ses milices. Nous ne pouvons pas compter ses prisonniers politiques ou ceux  qui sont devenus invalides. La torture est redevenue une réalité. Le complot permanent est de retour. Le tissu social n’a jamais été aussi déchiré. Les libertés n’ont jamais été aussi restreintes depuis la mort de Sékou Touré.

Nous savons que toute dictature crée et impose des institutions pour sa survie. Dans notre pays, ces institutions (cour suprême, commission nationale de la communication, conseil économique et social, les forces de sécurité, la CENI, etc.) ne servent qu’à maintenir cette même dictature.

Ceux qui se sont servis de ces institutions ont toujours été considérés comme des héros. En plus  il n’a jamais été question de remettre en cause un quelconque de ces instruments de la dictature. Le résultat est que la cour suprême ne pouvait faire autrement que de valider ce qui lui a été soumis. A travers sa décision, elle nous a interpellés pour que nous en tirions la leçon qui s’impose si nous ne voulons pas que ce qui est arrivé, ne se répète encore. Pour moi, cette leçon consiste à éviter de se tromper en croyant que l’on peut réussir l’alternance dans notre pays par des moyens légaux seulement comme nous l’entendons souvent. C’est par tous les moyens que nous devons passer pour réussir à éradiquer ce système criminel qui sévit en Guinée depuis l’indépendance.

 Barry Abdourahamane                                                                                                                       

Philadelphie (USA)

 

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