Chronique: Le paradis de l’enfer 1 (par Soulay Thi’ânguel)

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LE PARADIS DE L’ENFER 1

Me voici aux portes de ces nouvelles écritures, nu de toute prétention, mais fort de toute liberté de parole. Me voici, enceinte d’imaginations et de provocations. Me voici, porteur d’une bouche j’espère de beauté, plume d’amour, encre d’un univers couleur arc-en-ciel où chaque teinte sera le tintement d’une Guinée positive… Me voici, front apaisé des commentaires distillés de ceux qui foudroient du regard mon verre à moitié plein, parce qu’il le trouve, eux, à moitié vide, ou un quart… ou à la lie… Ceux qui dont la puissance des jugements rugueux et mal limés, voudraient me couper la langue à défaut de la maitriser.

Mémoire ! Mémoire ! dis-toi que t’es la plus belle dans cette belle cité ? Élevée par la vision d’un colosse, par la taille et par les ambitions mémorielles pour une Guinée qui ne s’oublie pas, d’une Guinée se rappelle, d’une Guinée qui se souvient, d’une Guinée qui rappelle au monde entier, que dans les tourments du passé, palpitent des fiertés dont la flamme à jamais continuera à briller, à scintiller. Mais d’abord, Mémoire ! Mémoire, dis-moi, qui es-tu ? « Faculté de conserver et de rappeler des choses du passé et ce qui s’y trouve associé ». C’est ainsi que le dico définit le mot délicat de beauté que t’es. Mémoire comme boîte d’où émergent des souvenirs frappés à la fois de clarté et d’obscurité.

Réminiscence ! Réminiscence ! dis-moi qui est le plus beau en ces temps d’inimitiés? Mémoires debout sur le destrier de nos amours célébrés et de nos douleurs qu’on voudrait voir oubliés. Mémoires, soufflements tendres exhumés et sifflements obscurs écrasés, paroles et silences jumelés, luminescence et incandescence se côtoient dans la plus gracieuse des frivolités. Construire l’avenir en s’inspirant du passé ? C’est dans ses verbes que la dernière fête du 02 octobre fut célébrée. Laideur ou beauté, obscurité ou clarté, nous avons porté par devers nous nos corps pliés, ployés, scarifiés par des décennies d’autoflagellations répétées, que nous en sommes venus à oublier que ce pays vibre aussi de beauté… et aussi de bonté… et aussi d’amour… que nous lui faisons en toute fidélité, malgré ici et là les imperfections que l’on pourrait relever et hurler le sentiment de systématiquement croire la violer… Que cette terre que nous vendons si souvent comme de la poussière cendrée, ne respire pas que de calamités… pas que d’absurdités… pas que de débilités, au point que certains en viennent à réclamer un récent passé, où la liberté nous était confisquée. Je vois d’ici, ou plutôt je lis d’ici, les commentaires distillés de ceux qui foudroient du regard mon verre à moitié plein, parce qu’il le trouve, eux, à moitié vide, ou à un quart… ou à la lie… Ceux dont la puissance des jugements rugueux et désespérément élevés, voudraient me couper la langue à défaut de la maitriser. Ils veulent la faire porter une culotte en lambeaux rafistolés, parce que considèreront-ils qu’elle pue d’une traitrise mal embouchée. Mais a fakoudou, c’est pas demain la veille que je vais la boucler. Parce qu’ils pérorent que quand je mange je devrais la fermer. Sauf que… vous connaissez la suite…

Donc, entendons-nous bien : ces éruptions intempestives de mon cerveau ne sont pas à quiconque adressées… et autant je m’en foutais des agitations de cinglés sanglés d’illuminations de ceux avec qui je n’avais pas des visions partagées, dans les fameuses « Tranchantes Thiâ’nguel » adorées, qu’ils n’arrêtent d’ailleurs pas de réclamer, autant j’en ai rien n’à carrer des excitations fantaisistes de ceux qui aujourd’hui cracheront sur ce que je considère comme de belles folies à l’endroit de ma Guinée.

Mais, et si nous revenions à notre machin-truc-chose de mémoire à conserver, de nos souvenirs à sauvegarder. C’est le nœud de cette chronique extraite de mes neurones désarticulées et de mon crâne mal rasé. Revenons donc à cette chose qui s’égare souvent dans les méandres de nos égos démesurés, dans les logorrhées de nos intelligences connement pendues à l’arc de nos lèvres grossièrement maquillées. Et ces magnificences que nous appelons « l’enfer » avec fierté… Et ces jaillissements éblouissants d’artistes pour un paradis qu’on n’arrête pas de diaboliser, par une ironie partout agitée, parce que les inspirations de certaines têtes ont cru bon de dire au monde entier une parole qui refuse des claques de calamités. Et face à deux, ces peintres aux pinceaux de cruautés. Et des fatalités, ils peuvent en dessiner. Et des opprobres, ils peuvent en jeter. Et des pierres, ils peuvent aussi en jeter. Et des joues, ils peuvent en gifler… sans tendre l’autre évidemment… Et des efforts, ils peuvent en ignorer. Et des… Et des… Et des… Et c’est ainsi… ainsi que, pris dans la houle des colères refoulées, pour non-reconnaissance des efforts multipliés, qu’on en vient à s’oublier, passer sous silence certains actes qui devraient être illuminés.

Eh oui ! Il en est ainsi de cette cité ministérielle, aux bâtiments anciens et nouvellement élevés, d’être baptisée des noms de ceux qui en tant que Guinéens ont participé à nous façonner. Eh oui! Il en est ainsi des combattantes Jeanne Martin Cisé, Mbalia Camara, Hadja Mafory Bangoura … Eh oui! Il en est ainsi de cette villa qui s’exibe de la grande comédienne et danseuse Jeanne Maccauley… De cette autre villa arborant les lettres des inoubliables compagnons d’indépendance Saïfoulaye Diallo, Diallo yacine, Ibrahima Barry III … Et des Premiers Ministres Lansana Béavogui, Lamine Sidimé … Et quelque part, au détour d’un mur lissé, étincellent les consonnances des Présidents de l’Assemblée Nationale… Elhadj Boubacar Biro… Elhadj Aboubacar Somparé… Kory Kondiano… Ça vous raconte quelque chose?, Moussa Diakité, Kéléfa Sall, Dr. Bana Sidibé, Hadja Rabiatiou Serah Diallo, Aioune Dramé, N’famara Keïta, Diallo Telly, Damantang Camara, Moriba Magassouba, Ismaël Touré, Loffo Camara, Hadja Andrée Touré, Emile Condé… Et encore… encore… encore et encore… et ainsi de suite…

Eh oui! Ils sont là aussi, paroliers et griffoneurs Djibril Tamsir Niane… Aboubacar Demba Camara… Ibrahima Sory Kandia… Camara Laye… Keïta Fodéba… Williams Sassine… Ils sont là, immortels parmi les mortels. Eh oui ! Ces murs sont les stigmates sciemment tracés, empreintes du temps qui passe dans notre Guinée. Ils sont mémoires… Ils sont histoires… Ils sont regards sur le passé, comme dirait le légendaire Bembeya. Ils sont héritages… Ils sont marquages… ils sont partages… Césures avec leurs erreurs et rayures, et ces ratures et ces blessures… et aussi de pages pures… Alors, si un jour, vos pieds vous guident à la lisière de cette cité, marquez le pas, approchez, inclinez la tête légèrement et tendez tendrement l’oreille… Sûrement que vous entendrez quelques notes des vocalises de Demba ou de Kandia, la tempérance de Djibril Tamsir Niane ou l’impertince de Sassine, quelques pas de danse remuant la densité de la terre du fait de Keïta Fodéba ou de Jeanne Maccauley, des appels au pèlerinage chez le centenaire Boubacar Biro à Mamou, père de courage verbale de Kéléfa Sall… de Rabiatou qui sera au rendez-vous pour quelques conseils… Ils seront tous là pour nous appeler à écouter, à leur confier nos douleurs, nos malheurs… et aussi évidemment nos bonheurs et nos rêves… Et c’est entre autres pour ceci que je rouvre ma gueule et je dégage… PAS!

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