La simplicité de Binta Laly Sow se lit d’abord sur son style vestimentaire. Toujours en tissu, Wax ou Leppy, cousu sans façon, le cou évasé laissant négligemment découvrir l’épaule et la clavicule qui affleure. Le modèle vintage est même appelé « Binta Laly » dans certains ateliers de couture. Son sac à main à bas coût ne paie pas de mine. Il est souvent effiloché, mais elle n’a que faire !
Thank you for reading this post, don't forget to subscribe!Binta Laly Sow c’est ensuite une vie simple au milieu des gens ordinaires dans les bas quartiers quand elle est à Conakry ou au village quand elle est en tournée en province. Manger dans un bol de Foutty en groupe, acheter une salade de pomme de terre et laitue au rond-point de la T7 au bord de la route, chez Mariama, mâcher l’autre moitié offerte d’une noix de cola séparée avec les dents, se coincer dans un taxi collectif et même prendre une moto-taxi en pleine nuit, c’est tout Binta Laly Sow.
Une simplicité qui peut étonner et même choquer compte tenu de sa notoriété et toute la construction psychologique sur l’opulence supposée des personnes célèbres. Binta Laly est riche mais du cœur, sinon c’est une pauvre hère qui vit au jour le jour en faisant ce qu’elle fait depuis l’âge de 13 ans : chanter.
Mais l’indigence de Binta Laly ne l’empêche pas d’être généreuse ; au contraire. Ce bout de femme toujours souriant est un cœur aimant brut de décoffrage. Elle est capable de vider son portefeuille pour n’importe quel « cas social ». Je l’ai vue acheter à manger pour plus aisés qu’elle durant plusieurs années à Sangoyah. Toujours avec le même sourire, toujours avec le même plaisir.
Le plus grand amour de Binta Laly va sans conteste à l’endroit de ses enfants « adoptés ». Elle qui n’a pas d’enfants biologiques vivants, a élevé et élève encore de nombreux enfants qui lui ont été « confiés » et qui portent souvent son nom (les fameux homonymes). A la fois une fierté et un fardeau pour elle, confrontée au défi de les héberger, les nourrir, les habiller et les éduquer. Elle n’y arrive pas toujours, évidemment, mais se tue à la tâche pour eux.
Cette grande responsabilité de maman-poule l’a poussée à une forme de mendicité tacite. Elle est en quête perpétuelle d’argent et n’hésite pas à revendre des biens précieux pour entretenir ses « poussins » dont certains sont devenus si grands qu’ils ont eux-mêmes de petits-enfants. Mais ils restent dépendants d’elle. Cela permet de mesurer tout le poids de la charge sociale qui pèse sur les épaules frêles de cette grand-mère de 77 ans.
Mais paradoxalement, c’est tout ce qui fait le bonheur de Binta Laly Sow ! Elle peut se plaindre d’un moment difficile mais jamais de sa vie entière. Elle est heureuse de ce qu’elle est, de ce qu’elle fait, de son « recevoir-donner », de sa vie ordinaire. Binta Laly agit telle une « passeuse » de l’entraide. Elle demande pour donner. Mais jusqu’à quand pourrait-elle faire ça ?
Si Abdoulaye Sadio Diallo et moi-même avons initié le projet « Un toit pour Binta » en sa faveur, ce n’est point pour l’arrêter de faire ce qui lui plait. C’est plutôt pour l’aider à le faire de façon plus organisée avec moins de contrainte et de prise de risques. Car son bonheur est très précaire.
C’est une personne vulnérable, car si aujourd’hui si elle s’arrêtait de chanter et de faire sa quête, elle tomberait inévitablement dans la dépendance. Et à ce moment-là, sa simplicité et sa générosité risquent d’être considérées par une opinion intolérante aux idées préconçues comme de la « naïveté », voire une « malédiction » de sa part.
Notre projet répond à cette préoccupation : lui trouver une source de revenus durables pour qu’elle puisse prendre sa retraite quand elle le voudra (ou quand celle-ci s’imposera) en toute sécurité.
Aidez-nous à l’aider.
Contact : 611 20 63 98
Par Alimou Sow