Samira Sabou, une journaliste nigérienne (administratrice du site d’information mides-niger.com et présidente de l’Association des blogueurs pour une citoyenneté active- ABCA-), est poursuivie et détenue à Niamey, la capitale du Niger, pour diffamation suite à une plainte du fils du président de la République du Niger, Sani Mahamadou Issoufou, dit Abba. L’accusation de notre consœur fait référence à une publication sur Facebook portant sur les personnalités impliquées dans une affaire portant sur une corruption d’agents public nationaux, suite à un audit du ministère de la Défense. Mais, aussi incroyable que cela puisse paraître, c’est le commentaire d’un internaute ayant incriminé le fils du président de la République, que la journaliste est aujourd’hui en détention, puisque Samira, dans sa publication, n’avait pas évoqué le nom de Sani Mahamadou Issoufou…
Thank you for reading this post, don't forget to subscribe!En tous les cas, très préoccupée par la détention de cette journaliste qu’elle dénonce avec vigueur, l’ONG Amnesty International a réitéré son opposition à la criminalisation de la diffamation et réclamé sa libération.
En réaction à l’arrestation mercredi 10 juin de la journaliste Samira Sabou, qui poursuivait son travail de suivi de l’affaire de l’audit du ministère de la Défense au Niger, Kiné-Fatim Diop, chargée de campagne sur l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International a déclaré :
« Samira Sabou est une journaliste respectée qui a jusque-là fait son travail légitime d’information sur les allégations de surfacturation et de matériel non livré révélées par l’audit du ministère de la Défense.
« L’accusation de diffamation à son encontre par le fils du président de la République n’est qu’une manœuvre de plus pour saper son travail et celui de tous les activistes anti-corruption qui dénoncent les allégations de corruption dans le pays.
« Samira Sabou, qui n’a commis aucun crime, risque jusqu’à trois ans de prison et une amende si elle était reconnue coupable. Amnesty International considère que son arrestation et sa détention sont arbitraires et rentrent dans le cadre du harcèlement judiciaire des acteurs de la société civile et des médias afin de les faire taire. La liberté d’expression doit être respectée, et Samira Sabou libérée immédiatement et sans condition.
« De plus, dans le contexte d’épidémie du COVID-19, sa détention arbitraire lui fait courir des risques accrus, au vu de la surpopulation et du manque d’installations sanitaires en milieu carcéral.
« Les autorités nigériennes doivent libérer tous les activistes pacifiques détenus simplement pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression, envisager de façon urgente des mesures supplémentaires afin de réduire la population carcérale et assurer le droit à la santé de tous les détenus. »
Complément d’information
Journaliste, administratrice du site d’information mides-niger.com et présidente de l’Association des blogueurs pour une citoyenneté active (ABCA), Samira Sabou a été convoquée le 9 juin par le doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance hors classe de Niamey, la capitale du Niger, pour comparaître sur une affaire portant sur une corruption d’agents public nationaux.
Le mercredi 10 juin, elle a répondu à la convocation du juge d’instruction. Mais le mandat de comparution n’avait aucun lien avec la procédure indiquée. En effet, elle sera accusée de diffamation suite à une plainte du fils du président de la République du Niger, Sani Mahamadou Issoufou, dit Abba.
L’accusation fait référence à une publication sur Facebook portant sur les personnalités impliquées dans l’affaire de l’audit du ministère de la Défense datant du 26 mai 2020. Après la publication, une tierce personne a fait un commentaire incriminant le fils du président de la République. Mais, Samira dans sa publication n’avait pas mentionné le nom du fils du président. Dans tous les cas, Amnesty International s’oppose à la criminalisation de la diffamation.
L’audit du ministère de la Défense du Niger a révélé des détournements de fonds de plusieurs milliards de francs CFA destinés à l’achat d’équipements pour les soldats engagés sur les différents fronts de lutte contre les groupes armés entre 2017 et 2019.
Selon un communiqué du porte-parole du gouvernement, l’audit a relevé des insuffisances dans les procédures de passation de marchés, ainsi que dans le suivi de leur exécution.
Depuis mars 2020, des membres de la société civile ont dénoncé sur les réseaux sociaux et lors de manifestations les faits révélés dans le rapport d’audit – qui a fuité – et demandé que des poursuites judiciaires soient engagées.
Sept militants ont été arrêtés entre le 15 et le 17 mars à Niamey après avoir organisé une manifestation pour réclamer une enquête et la poursuite des personnes suspectées de détournement des fonds destinés au ministère de la Défense.