C’est désormais notre rendez-vous hebdomadaire. Tous les jeudis, RFI fait le point sur la recherche d’un traitement pour lutter contre l’épidémie de Covid-19, la maladie venue de Chine, et que l’on ne sait toujours pas guérir malgré la multiplication des essais cliniques dans le monde et des polémiques.
Malgré la multiplication des essais cliniques dans le monde et des polémiques, il n’existe toujours pas de traitement, même si des résultats prometteurs d’une étude menée à Hong Kong ont été publiés dans la revue The Lancet.
127 patients ont été enrôlés pour cette étude menée du 10 février au 20 mars. Ils ont été séparés en deux groupes : l’un de contrôle, l’autre à qui une tri thérapie a été administrée : des interferons, le duo lopinavir-ritonavir (des anti-viraux utilisés contre le VIH-Sida) et un antigrippal, la ribavirine.
Ces molécules avaient déjà fait l’objet d’essais cliniques, mais elles avaient été étudiées seuls. C’est donc la première fois que leur effet combiné est observé. « Les auteurs ont montré dans cet article que la tri thérapie diminuait le temps pour lequel la charge virale devenait nulle », explique Frédéric Adnet, chef du service des urgences à l’hôpital Avicenne. « Ils ont trouvé une différence de 3,8 jours entre les deux groupes. C’est-à-dire que la charge virale diminue plus rapidement dans le groupe traité. » Le résultat est donc intéressant, mais demande cependant à être précisé : « On reste un peu sur sa faim : la mortalité dans les deux groupes est la même. Or ce qui nous intéresse, c’est que les gens meurent moins. Il faudrait être sûr que la différence observée en terme de charge virale a une répercussion en terme de mortalité. »
Néanmoins, cette étude propose une base solide et sa méthodologie robuste permet d’en tirer des conclusions. C’est malheureusement de plus en plus rare en cette période épidémique où les polémiques concernant les essais cliniques se succèdent. Après le feuilleton de l’hydroxychloroquine et de l’azythromycine, l’AP-HP, l’assistance publique – hôpitaux de Paris, pourtant grande institution en a montré un exemple récemment en pêchant par précipitation. Elle a communiqué des résultats sur un essai toujours en cours, qui cherche à démontrer l’efficacité du Tocilizumab pour atténuer l’orage cytokinique – la surréaction du système immunitaire dont sont victimes certains malades du Covid-19. Les premières données ont l’air encourageantes, mais en communiquant si tôt, et sans fournir de données, l’AP-HP a pris le risque de nourrir de faux espoirs. Cette histoire a même entraîné la démission collective en protestation du comité de suivi de l’essai, une chose rarissime. « On sent qu’il y a une sorte de course à l’échalote aux résultats dans cette épidémie », estime Frédéric Adnet. « Ca rend fou un peu tout le monde. C’est à celui qui trouvera en premier une molécule et on dirait que personne n’a le temps que les choses soient bien faites et respecter le B.A.-BA de la recherche clinique. On ne parle pas des résultats d’un essai clinique avant qu’ils ne soient publiés. »
NewsletterRecevez toute l’actualité internationale directement dans votre boite mail
Dans l’attente des résultats intermédiaires de Discovery
Une publication est justement très attendue. C’est celle de l’essai européen Discovery. Prévue initialement à la fin du mois d’avril, c’est ce jeudi 14 mai qu’ils seront normalement publiés. Malheureusement, ils ne seront au mieux qu’intermédiaires. Discovery devait en effet étudier l’effet de 4 traitements différents (Remdesivir, Kaletra, Kaletra et interferons, hydroxychloroquine) sur 3 200 patients. Il n’a malheureusement aujourd’hui d’européen que le nom, puisqu’un seul patient a été enrôlé hors de France, au Luxembourg. Seuls 750 malades environ en font donc partie, et avec 2 400 personnes en moins, les résultats de Discovery seront donc bien moins solides.
Si ces difficultés à recruter des patients ne sont pas nouvelles, elles n’ont été admises publiquement que très récemment. Un aveu tardif dommageable car il s’agit d’un essai qui a suscité beaucoup d’espoir, et dont les autorités et les instigateurs avaient fait une large promotion. Malheureusement, ces promesses ne devraient pas être tenues. En ces temps de défiance et de polémique envers la recherche clinique, tout le monde s’en serait bien passé.