-Tribune-Tous ou presque s’accordent à dire qu’en Guinée, les routes ne parlent pas. Elles sont tout simplement muettes. Ce constat est d’autant réel que ce mutisme des voiries urbaines et autres catégories de routes constitue une véritable source d’insécurité routière. En ce sens, que l’environnement routier dispose de ses propres règles auxquelles tout utilisateur a l’obligation d’obéir. Celles-ci représentées par des symboles conventionnels, sont matérialisés par la signalisation routière – verticale, horizontale et sémaphorique ou lumineuse.
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Ce sont ces allégories qui indiquent par exemple, les ordres de priorité dans le sens giratoire et autres intersections, les sens interdits, les passages piétons, l’interdiction ou l’autorisation de dépasser, etc. Mais encore faut-il que les usagers sachent les lire correctement et s’y conforment scrupuleusement. Ceci implique la question cruciale de la formation obligatoire tant théorique que pratique dans les établissements d’enseignement spécialisés, que sont les auto-écoles. Mais ça, c’est un autre débat…
Revenant à notre sujet, il est annoncé par les autorités en charge des transports routiers la confection et l’installation de 1.000 panneaux de signalisation dont certains sont déjà visibles sur les voiries de Conakry. Bonne nouvelle ! Une telle initiative salutaire et encourageante ne peut que réjouir tout intervenant dans ce domaine et plus largement l’ensemble des usagers de la route. Mais attention, quelques problèmes demeurent et il est de mon devoir citoyen et professionnel d’interpeler ces autorités afin que des corrections soient apportées. L’effet escompté étant que la circulation et la sécurité routière de tous s’améliorent de façon significative Il s’agit des normes et de la qualité insuffisantes des panneaux déjà implantés dont certains sont tout simplement peints en peinture ordinaire et ne sont ni visibles ni lisibles la nuit.
En effet, les panneaux de signalisation sont d’une telle importance dans l’environnement routier que leur confection et installation doivent répondre à certaines normes. En l’absence des agents des forces de l’ordre, ils jouent le rôle de régulateur de la circulation routière afin d’éviter des conflits entre différentes catégories d’usagers – motorisés ou non motorisés – et ainsi réduire les accidents de la route. Mais pour qu’un panneau remplisse cette fonction, il doit être suffisamment visible et facilement lisible de jour comme de nuit, à une certaine distance et en toute saison. Cela peut dépendre évidemment de son emplacement, mais en grande partie de la qualité du support utilisé.
Sans pour autant m’aventurer sur le domaine des spécialistes en signalisation routière, l’une des normes basiques des panneaux routiers reste quand même la qualité du support sur lequel il est imprimé. A l’image d’une plaque d’immatriculation appelée également plaque minéralogique, ce dernier doit être suffisamment rétro-réfléchissant. C’est-à-dire qu’il doit pouvoir renvoyer la lumière émise par les phares d’un véhicule vers la source lumineuse sans toutefois entraîner l’éblouissement des usagers. Pour ça, son cône de rétroflexion doit être large pour permettre aux conducteurs, notamment plus âgés et des camions – assis en hauteur – d’avoir plus de luminosité afin de voir et de lire rapidement les panneaux la nuit.
Les mêmes normes concernent également la couleur et le contraste des panneaux qui, de jour doivent permettre une bonne visibilité et une facile lisibilité. Les couleurs fluorescentes, améliorant la visibilité tant nocturne que diurne sont en la matière très prisées. En fait, la technologie n’a jamais cessé d’évoluer dans ce sens. Il y a aussi les normes liées aux dimensions des panneaux de signalisation, qui doivent impérativement tenir compte de la vitesse usuelle des véhicules, de sorte que les signaux soient suffisamment visibles de loin et facilement compréhensibles à l’approche. Quatre catégories de dimensions pour chaque type de panneau routier sont connues et utilisées : petite, normale, grande et très grande dont le choix dépend des spécificités de la route et des conditions de circulation.
Parlant des inscriptions sur les panneaux routiers, la convention de Vienne relative à la signalisation routière signée le 8 novembre 1968 a, en effet, uniformisé tous les symboles et signaux routiers ainsi que les marques routières afin de faciliter la circulation routière internationale et améliorer la sécurité des usagers sur la route. Si fait que les mêmes panneaux se retrouvent partout sur les routes mondiales, en dépit du fait que le sens de la circulation est à droite dans certains pays et à gauche dans d’autres. Il faut dire que même si une certaine souplesse est accordée aux parties contractantes de ladite convention pour faciliter la compréhension des symboles et signaux routiers, leurs caractéristiques essentielles ne peuvent faire l’objet d’aucune altération.
En définitive et au regard de tout ce qui précède, il est aisé de comprendre que n’importe quel artisan ne peut confectionner un panneau de signalisation réglementaire. Cela requiert des compétences, une expertise et un minimum d’équipements. Nous devons enfin sortir de ce bricolage et faire un travail professionnel afin d’éviter du gaspillage et l’éternel recommencement, qui deviennent malheureusement le propre du guinéen. Cette réflexion me fait penser aux barrières de sécurité – rouge et blanche – confectionnées pour accompagner la mise en œuvre du fameux plan d’urgence ayant précédé les états généraux de la sécurité routière tenus du 6 au 10 novembre 2017. On les voit tous dans quel état pitoyable sont-elles aujourd’hui après seulement 1 an d’utilisation. La qualité déterminant généralement la durabilité.
Alors vivement aux panneaux de signalisation sur nos routes, mais de grâce pas n’importe lesquels. Notre sécurité à tous en dépend !
Mamoudou KEITA
Président de l’Observatoire Guinéen de la Sécurité Routière et de la Mobilité Urbaine (OBSERMU)
Expert en sécurité routière PAST – UE