À l’occasion de la visite d’Alpha Condé aux États-Unis et en France, plusieurs organes de presse de réputation, dont le Washington Post et le Monde, ont publié des articles sur la Guinée. «Le Président de la Guinée porte le poids de ce que le virus Ébola a fait à son pays» est le titre du papier de d’AMY BRITTAIN du Washington Post. Bien que l’article soit dans la section Style du journal, le contenu est un cas typique de journalisme léger.
Thank you for reading this post, don't forget to subscribe!
Paris-Match aurait fait un meilleur boulot dans le romantisme éculé de présenter Alpha portant le sacerdoce d’Ébola. AMY BRITTAIN n’a aucun recul critique. Le contexte historique et médical de l’épidémie est passé sous silence dans son article. Pas une mention – même lapidaire – n’est faite des données sur l’épidémie, des moyens et stratégies de lutte, des progrès et des défis d’un combat qui mobilise le monde entier. Le maitre de cérémonie lors de l’interview n’était rien d’autre que Jesse Jackson. Le temps et le goût immodéré pour l’avant-scène de l’actualité ont réduit le militant des droits civiques américains à faire d’une carrière l’incompétence de certains dirigeants africains. Dans un comble de népotisme que la journaliste a décidé d’ignorer, le traducteur de service était le fils d’Alpha Condé. Mohamed Condé veut assurément faire pleurer. Selon la journaliste, c’est avec les larmes presque aux yeux qu’il parla de l’isolement de son président de père. « Il est devenu le symbole de la peur et de la stigmatisation« . Le fiston précisa qu’Alpha Condé a constamment vécu sous la peur et la pression.
Ce qu’on attendrait d’un homme que le destin a «gratifié» de l’honneur de servir sa nation au plus haut poste, c’est de dompter sa peur. C’est ce qui distingue les hommes d’état et les criminels au pouvoir. Mais, Alpha Condé a fait de sa peur l’unique mobile de son comportement. Il s’est condamné à vivre dans un monde de phobies, de s’embourber dans une gangue de cynisme, incapable de se hisser au-dessus de la vengeance, du désir de manipuler les faibles et les partenaires et de celui d’humilier les adversaires. Comme pour Sékou Touré, l’honneur a prouvé être une cure insuffisante contre les peurs refoulées, les complexes innommables et les hantises du passé.
La politique de pachyderme du président guinéen a montré ses limites avec d’Ébola. Le monde entier aura souffert de son incompétence. La région de l’Afrique de l’Ouest encore plus. Même loin du terrain guinéen, les observateurs internationaux savent qu’Ébola est devenu du pur Business. Les manigances et les montages médiatiques d’Alpha et de Mohamed Condé ne peuvent pas les tromper. Beaucoup d’entre eux ne manquèrent de relever l’exploitation éhontée que le président Guinéen fait de l’épidémie.
L’article de Peter Pham (traduit en français et postés sur plusieurs web sites guinéens) était plus qu’un contre-pied à l’escroquerie de la famille Condé. Mr. Pham attire l’attention de l’opinion internationale sur les dangers qui planent sur la Guinée, autrement que par le misérabilisme sur Ébola qu’Alpha Condé – présenté comme héros de la liberté – n’a aucune gêne à pratiquer. Le rôle de l’Atlantic Council où Mr. Pham travaille est d’éclairer le public et l’administration américaine sur les défis du 21 siècle dans un monde interdépendant. La rigueur intellectuelle est nécessaire pour appréhender les risques et promesses du monde contemporain. Peter Pham a montré en être pourvu.
L’article du Monde sur «l’Axe du mal» donne un éclairage biaisé de ce que la Guinée est devenue. Qu’est-il advenu du grand quotidien de la France pour ce genre de reportage à l’emporte-pièce? Le reportage sur l’arrière-monde des délaissés de Conakry est en fait un ensemble de clichés à l’intersection du journalisme de sensation et de la manipulation ethno-politique. De par son manque de contexte historique, l’article est une moquerie des luttes des guinéens pour se défaire des carcans des despotismes. Le papier crée un mythe et y force le focus – d’un quartier et d’un faux épicentre – du combat que livrent des millions de guinéens dans tout le pays et dans la diaspora. Les sacrifices et les martyrs de l’un des quartiers les plus éplorés par les dictatures de Conté et Condé sont éclipsés par des insinuations avec des mots-clés chargés de non-dits dangereux: gangsters, peuls, trafiquants de drogues etc. Le spécimen de photos de jeunes exhibitionnistes que l’article exhibe ne représente ni les populations, ni leurs aspirations, ni leurs difficultés.
L’amalgame entre les habitants, l’opposition et le discrédit de légitimes combats est une aubaine pour le RPG. Pas étonnant que l’article du Monde soit diffusé à forte dose par ses propagandistes. Si les assertions de l’article révèlent des trous béants de la société guinéenne et si l’existence de ces gangs est antérieure au pouvoir d’Alpha Condé, leur promotion politique participe bien au travail pernicieux que le RPG a fait durant 4 ans pour laminer la société civile guinéenne. De n’avoir pas fait une analyse de ce processus, fait du reportage – volontairement ou non – un medium de propagande pernicieuse. Et – pire encore – il banalise et justifie la répression contre les habitants de ces quartiers. Avec mépris, le reporter, Mr.Joan Tilouine, indique que «ces jeunes qui se pensent en guerre et au centre de l’échiquier politique pourraient bien encore être les éternels perdants d’un jeu qui, au final, les dépasse». Il oublie que ces jeunes sont une partie intégrante de la Guinée et de son échiquier politique. S’ils se pensent être le centre des jeux, c’est parce qu’ils sont jeunes et qu’ils sont la preuve palpable de la faillite de l’administration guinéenne, dans le domaine de l’inclusion sociale et de l’éducation. Contrairement à Mr. Tilouine, il n’est pas dit qu’ils seront des éternels perdants car ils connaissent parfaitement ce dont ils souffrent et qui peut-être résumé en impunité et mal gouvernance. Qu’un reporter en parle comme de quelque chose qui les dépasse est de la pure prétention.
Ourouro Bah