La résurgence du virus ébola en Afrique de l’Ouest met en lumière la fragilité du discours sur l’intégration régionale prônée par certains Etats africains. En effet, face à la rapide propagation du virus, plusieurs pays de l’Afrique de l’Ouest ont décidé de fermer leurs frontières avec leurs voisins. Le Kenya, pays pourtant situé en Afrique de l’Est a également suspendu l’entrée sur son territoire des voyageurs en provenance de Guinée, de Sierra Leone et du Liberia.
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Même cas de figure pour l’Afrique du Sud et le Tchad. En outre, des vols ont été suspendus et des rencontres sportives ont été délocalisées ou sont suspendues. Même le Sommet de l’Union africaine sur l’emploi, qui devait avoir lieu à Ouagadougou, a été reporté sine die. Le repli sur soi est la nouvelle donne dans une Afrique de l’Ouest qui se veut pourtant un modèle d’intégration sous régionale. Le principe de la sacro sainte solidarité africaine est remplacé par celui de la précaution.
L’épidémie, qui a débuté en Guinée en mars 2014 et s’est rapidement propagée au Liberia, en Sierra Leone et au Nigeria est l’une des plus graves crises de santé publique jamais connue en Afrique. Elle met surtout en évidence la défaillance des systèmes de santé de plusieurs pays africains tétanisés par l’enjeu sanitaire actuel. L’échec collectif des Etats à contenir la propagation du virus a poussé la Banque africaine de développement (Bad) à approuver une subvention de 60 millions de dollars, faisant partie d’un montant global de 120 millions de dollars à mettre en œuvre immédiatement afin de renforcer les systèmes de santé publique de l’Afrique de l’Ouest. La banque africaine concentre ses investissements sur le renforcement des systèmes de santé publique à travers le renforcement des capacités, le développement des ressources humaines, la vulgarisation de l’usage des technologies mobiles et le renforcement des programmes de gouvernance et des institutions régionales.
Bien plus, après avoir affiché un profil bas sur la question pendant un long moment, l’Union africaine (Ua) via son Conseil de paix et de sécurité (Cps) a annoncé le déploiement immédiat d’une équipe spéciale dans les quatre pays touchés par l’épidémie de fièvre ébola. Le coût de l’opération s’élève à quelque 25 millions de dollars, avec le soutien des Etats-Unis ainsi que d’autres partenaires. La nouvelle opération débute à la fin du mois d’août et devrait durer six mois avec une rotation mensuelle des bénévoles. L’Ua devrait également convoquer en septembre une réunion extraordinaire des ministres africains de la Santé afin d’envisager l’accroissement des fonds d’urgence destinés à la santé publique, la sécheresse et la famine.
La fermeture des frontières ou encore la délocalisation des certains évènements majeurs ne sont que l’arbre qui cache la forêt. Les maladies n’ont pas de frontière. Les Etats devraient plutôt s’atteler à améliorer leurs fragiles systèmes de santé dont les limites son connues de tous. Beaucoup de dirigeants africains préfèrent aller se faire soigner à l’étranger au moindre malaise prouvant ainsi le peu d’intérêt qu’ils accordent à leurs propres hôpitaux. Ebola n’est pas invincible. La République démocratique du Congo, premier pays africain à avoir identifié le virus en 1976, en est venue à bout à 5 reprises avec l’aide de ses partenaires. Elle a, au fil des années, développé une expertise dans la lutte contre cette épidémie.
Le pays est désormais impliqué dans la gestion de la riposte en Afrique de l’Ouest grâce à une délégation qui comprend notamment le docteur Muyembe Tamfum, épidémiologiste de renommée internationale et l’un des acteurs majeurs qui ont permis d’endiguer toutes les crises survenues en Rdc. Alors que les Etats-Unis semblent avoir trouvé un remède à ce virus, la coopération médicale entre les Etats devrait primer dans la lutte contre cette épidémie et non des fermetures des frontières ou des délocalisations qui ne sont que de nature à renforcer la psychose au sein des populations déjà soumises à rude épreuve au quotidien.
Patrick Ndungidi
Journaliste de la Rdc