CONAKRY,19 AOUT 2014-Samedi 16 août dernier, le CECODE-Guinée a rendu public à la Maison de la Presse un rapport d’un sondage qu’il a effectué auprès de 87 personnes pour comprendre leur perception et niveau de connaissance de la fièvre Ebola qui sévit en Guinée depuis mars.L’objectif visé par le sondage est d’accroître le système de communication et d’information en faveur des communautés sur la question relative à l’épidémie d’Ebola afin de renforcer la sensibilisation et promouvoir la participation communautaire. Voici le rapport.
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Démarche méthodologique
Pour la collecte des informations, une équipe de jeunes enquêteurs a été identifiée et formée. Avant l’administration proprement dite du questionnaire, un prétest a été fait auprès d’un public de 10 personnes. Ce prétest a permis de valider le questionnaire et d’harmoniser les points de vue. Voir en annexe le questionnaire.
Les 10 enquêteurs sont des étudiants en licence 1, 2 et 3. Les cibles de ce sondage sont les citoyens à la base dans la commune de Ratoma. Le choix des enquêtés est fait de façon aléatoire dans la commune.
Dans la mesure du possible, si l’enquêter est consentant, l’agent enquêteur commence à relever le nom et le numéro de téléphone de la personne à interviewer. Cette disposition est très importante pour la suite des activités, notamment le porte à porte envisagé.
Résultats
Au total, 87 personnes ont été interviewées.
Après traitement et analyse desfiches, nous vous livrons la transcription intégrale des perceptions et le niveau de connaissance des citoyens sur l’épidémie d’Ebola.
Question 1 : L’épidémie Ebola représente quoi pour vous ?
Plus de 72% des personnes interviewées trouvent la maladie « dangereuse, contagieuse, grave et mortelle ». Par contre, pour 24% des enquêtés, l’épidémie Ebola ne représente rien ; et 4% des personnes interviewées reste perplexes.
On relève dans les propos ce qui suit :
– « L’épidémie Ebola n’existe pas. Je ne crois pas à ce que les gens disent ».
– « Cette maladie ne représente rien pour moi parce que je ne comprends rien »
– « Je ne suis pas sûr de l’existence de la maladie ».
– « J’ai des inquiétudes d’aller à l’hôpital, j’ai peur »
– « Cette maladie est créé par les USA, les blancs ».
– « Je ne comprends rien de cette maladie ».
– « C’est un châtiment de Dieu ».
– « L’inquiétude ».
– « C’est pour protéger les intérêts du gouvernement »
– « Je vois à la télé des gens masqués soi-disant pour soigner la population ».
– « Je ne veux pas en parler ».
– « C’est un grand qui m’a dit que cette maladie ne vient pas de la forêt sinon nous allons tous périr ».
– « Sanction divine ».
Question 2: Croyez-vous à l’existence de la maladie?
24 interrogés sur 87 ne croient pas du tout l’existence de la maladie, soit 28%. Les raisons qu’ils évoquent sont :
– « ils n’ont pas vu un malade du virus Ebola ».
– « C’est un mensonge ».
– « C’est le travail des politiciens »
Parmi les citoyens qui croient à l’existence de la maladie, les enquêteurs ont relevé dans leurs propos des réponses erronées comme :
– « Le virus Ebola se transmet par la chaleur ».
– « Le virus Ebola se transmet par les ordures ».
De façon générale, les populations interrogées et qui croient à l’existence de la maladie connaissent les modes de transmission du virus Ebola :
– « Le contact avec les cadavres des victimes d’Ebola »
– « La sueur des malades d’Ebola ».
– « Les habits portés par les malades d’Ebola ».
– « Le contact physique avec les malades d’Ebola ».
– « En mangeant la viande de brousse ».
Question 3: Comment on l’évite?
Les réponses données par les personnes interrogées sont variées et disparates:
– « Etre propre ».
– « Prier Dieu ».
– « Je ne connais pas ».
– « Eviter de manipuler le corps des victimes ».
– « Se laver les mains après les toilettes ».
– « Eviter le contact direct avec les inconnus ».
– « Eviter les lieux publics non protégés ».
– « Ne pas saluer ».
– « Ne pas manger avec les malades ».
– « Désinfecter les latrines ».
– « Ne pas voyager dans les régions où se trouvent la maladie ».
– « Eviter les lieux de regroupement : marché, bus, taxis ».
– « Se laver les mains avec l’eau de javel ».
L’analyse des réponses sur la première question, montre qu’une grande partie de la population interrogée savent que le virus d’Ebola est dangereux, contagieux et mortelle. Une partie de la population touchée (24%) ont émis des propos que nous classons dans la catégorie des représentations. Ces propos mettent en évidence les croyances et les contingences culturelles qui constituent de véritables obstacles pour un changement de comportement. C’est pourquoi, pour améliorer le système de communication en vue de combattre le virus Ebola avec efficacité, il convient d’intégrer dans le dispositif d’information et de sensibilisation la prise en compte des préjugés de la population.
Les réponses fournies sur la deuxième question montrent, globalement, le niveau de connaissance appréciable de la population sur les modes de transmission du virus Ebola. Toutefois, il existe encore quelques résistances dues aux aprioris que les citoyens ont sur la maladie.
Sur la troisième question, le niveau de connaissance de la population est très appréciable quant aux dispositions à prendre pour éviter la maladie.
Comment mieux communiquer pour combattre Ebola?
Cecode-Guinée étant convaincu que :
– Il n’y a pas de communication sans « réponse en retour » qui permette à l’émetteur de vérifier qu’il a été entendu et compris ;
– Il n’y a d’information véritablement reçue qui ne soit pas au préalable désirée ;
Cette observation permet de tirer une conclusion d’ordre pédagogique : tout apport d’information, quelle que soit la technique employée pour l’apporter doit être précédé de la compréhension des représentations des citoyens en vue de faciliter l’appropriation de l’information.
Pour étayer cette conclusion, Jean Louis Martinand a expérimenté dans un cadre purement didactique le concept objectif-obstacle.
Dans le cadre de la lutte contre le virus Ebola, le premier niveau d’objectif est d’utiliser les canaux de communications disponibles pour informer les citoyens sur les mesures d’hygiène à observer. Il se trouve qu’avec ce sondage que nous venons de réaliser, il apparait encore, les obstacles qui font barrière pour une meilleure appropriation des messages sur l’épidémie d’Ebola. C’est là où Jean Louis Martinand propose d’utiliser la caractérisation de l’obstacle comme mode de sélection de l’objectif : Deuxième niveau d’objectif.
Jean Louis Martinand et collègues poursuivent, qu’il ne faut pas sous-estimer l’obstacle si l’on veut pouvoir le franchir, mais il faut le penser d’une manière qui rende possible son dépassement.
Dans le cadre de la lutte contre le virus Ebola, Cecode-Guinée propose comme démarche de :
– Rencontrer les personnes qui ont des représentations erronées dans le cadre d’un porte à porte que nous projetons très prochainement. Les contacts téléphoniques de certaines des personnes interrogées sont disponibles ;
– D’approfondir la discussion avec ces personnes pour cerner les contours de leurs a priori ;
– Favoriser des confrontations en apposant des témoignages concrets aux représentations erronées en vue de déstabiliser ces personnes dans leurs positions ;
– Faire des synthèses en terme de disposition pratique sur la nouvelle réalité souhaitée pour prévenir l’épidémie d’Ebola.
Nous estimons que pour une lutte efficace contre le virus Ebola, le rapport à l’information doit être pris au sérieux car une seule résistance à cause des préjugés sur les mesures d’hygiène à observer est un danger potentiel pour la population. C’est dans ce cadre précis que cecode-Guinée compte s’investir pour apporter sa contribution d’ordre pédagogique dans le sens de l’amélioration du système de communication jusque-là mis en place.