CONAKRY,27 NOVEMBRE 2013-L’exploitation minière croissante dans les neuf pays membres de l’Autorité du Bassin du Niger (ABN), à cheval entre l’Afrique de l’Ouest et centrale, cause la dégradation de la qualité de l’eau, un phénomène jugé préoccupant par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) lors d’une réunion d’experts en cours à Yaoundé.
Thank you for reading this post, don't forget to subscribe!
A l’origine de la Mission d’étude et d’aménagement du Niger (MEAN) créée dans les années 1950 et transformée en 1964 en Commission du Fleuve Niger (CFN) avant sa dénomination actuelle opérée en 1980, l’Autorité du Bassin du Niger est un ensemble de pays dotés de précieuses ressources naturelles telles que l’eau et, pour une grande majorité d’entre eux, la forêt.
Notamment composée du Bénin, du Burkina Faso, du Cameroun, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée, du Mali, du Niger, du Nigeria et du Tchad, cette organisation régionale se destine, d’après une de ses principales missions, au « développement intégré du Bassin dans les domaines de l’hydraulique, de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, de la pisciculture, de la sylviculture, de l’exploitation forestière, des transports, de la communication et des industries ».
En prélude à la 32e session ordinaire du Conseil des ministres prévue vendredi, une réunion du Comité technique des experts de l’ABN se tient depuis lundi à Yaoundé, la capitale du Cameroun. Parmi les dossiers examinés : l’exécution en cours du Projet de développement des ressources en eau et de gestion durable des écosystèmes dans le Bassin du Niger, qui comporte, entre autres actions, la construction et la réhabilitation de barrages hydroélectriques.
A l’évidence, ce projet vise, parallèlement à l’amélioration de la croissance économique des pays du pourtour de ce grand bassin hydraulique, à la conservation et la sauvegarde des ressources naturelles s’y découvrent et servent de base à la vie et l’alimentation des populations riveraines.
Pourtant, de l’avis du Pr. Awaïss Aboubacar, coordonnateur du Programme Eau et Zones Humides de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), les dégâts de l’exploitation minière sur la qualité de l’eau sont une source de préoccupation majeure dans le Haut-Niger par exemple.
« Quand je prends par exemple certains pays comme la Guinée, avec l’exploitation artisanale mais aussi industrielle de l’or, c’est l’utilisation de certains produits tels que le mercure qui pollue l’eau. Dans certaines régions, la qualité de l’eau même pour la consommation humaine et animale n’est pas intéressante », a observé cet expert à Xinhua en marge de la réunion des experts de l’ABN à Yaoundé.
D’après lui, « on sait très bien que la contribution de la transformation minière est très importante pour le PIB, mais n’empêche qu’il est important que ça se fasse dans un cadre réglementé. Il y a des codes miniers qui existent, il y a des codes de l’environnement qui existent et il faut tenir compte donc de leurs contenus dans la règlementation en vigueur pour faire en sorte que les choses se fassent dans les bonnes conditions. »
En cause, la faiblesse des Etats à faire respecter les lois qu’ils font voter eux-mêmes par leurs propres Parlements. « Malheureusement, déplore le Pr. Aboubacar, c’est ce qu’on observe et c’est la question sur laquelle il faut mettre le doigt. On a de très beaux textes, qui ont été bien rédigés, mais dans l’application ça pose problème. Dans certains cas, c’est même les textes d’application qui n’existent pas ».
Et de démontrer encore : « Toujours un exemple frappant, c’est la Guinée où l’activité minière est croissante et on parle du ‘château d’eau de l’Afrique de l’Ouest’, et là où le fleuve Niger prend sa source. Vous avez des textes d’application très importants du côté de l’environnement, mais sur les questions liées à l’eau, il y a des lois mais il n’y a pas de textes d’application. »
Le sujet ne figure pas dans l’agenda de la réunion du Comité technique des experts et du Conseil des ministres, essentiellement consacrés à l’examen des financements mis à disposition du secrétariat exécutif de l’Autorité dirigé par le général d’armée nigérian Collins R. U. Ihekire, pour son fonctionnement et la mise en œuvre de ses plans d’action.
Mais, le président des usagers et usagères des ressources naturelles du Bassin, portion du Cameroun, Moussa Koué, ne s’est pas non plus empêché de s’inquiéter face au constat selon lequel « le défi, c’est qu’il préserver durablement les ressources naturelles qui sont en dégradation vertigineuse ».
« Nous avons nos rivières qui tarissent, notre végétation qui disparaît, notre faune qui s’appauvrit. Chaque jour, nous le constatons, mais nous ne faisons absolument rien pour les préserver. On ne peut pas s’empêcher du manger du poisson, de la viande de biche, ou de traverser le mayo (fleuve) avec la pirogue. Mais il faut une gestion durable de tout ça », a souligné à son tour à Xinhua cette source indépendante.
Moussa Koué se félicite de l’existence de l’organisation régionale qu’il décrit comme « une idée géniale, parce que ça regroupe plusieurs sensibilités. Il y a neuf pays, neuf pays qui ont différentes visions de la chose, différentes manières de voir. Donc en les mettant ensemble, à travers l’ABN, moi je pense que c’est la stratégie la plus idoine ».
Un bémol cependant : fédérer « les synergies, les stratégies et les moyens », ce qui veut dire que « nous avons des traits d’union avec toutes nos ressources », s’apparente, d’après lui, à une épreuve d’obstacles pour faire avancer l’Autorité.
« Pour mettre tout ça en harmonie, que cela joue un jeu cohérent, ça devient un peu difficile. Parce que chacun pense à protéger sa légitimité naturelle. Et c’est cet aspect-là qui nous freine », déplore-t-il.
C’est ce qui explique notamment la faible réactivité des Etats, un véritable goulot d’étranglement en partie lié aux lenteurs administratives, dans la mobilisation des ressources et l’exécution des multiples projets et programmes actuellement menés par le secrétariat exécutif de l’ABN basé à Niamey au Niger.
Au 30 septembre par exemple, le budget de fonctionnement de cette instance exécutive s’établissait à 1.724.624.000 francs CFA, soit un taux de mobilisation et d’exécution de 45%, de source officielle. Quant au budget relatif aux projets et programmes, 23. 313.597.855 francs CFA étaient déclarés, soit 55% de taux de mobilisation et d’exécution.
Xinhua