Organisation des législatives le 30 juin: Pourquoi Alpha Condé ne reculera pas selon Jeune Afrique.

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L’opposition guinéenne descend à nouveau régulièrement dans les rues de Conakry depuis le 18 avril. En cause ? La décision du chef de l’État, Alpha Condé, d’organiser des législatives le 30 juin. « Mais pourquoi Alpha a-t-il signé ce décret ? » À Conakry, la question est sur toutes les lèvres. Depuis le début du mois d’avril, la tension baissait entre le pouvoir et l’opposition. Les deux parties s’étaient entendues sur le nom d’un facilitateur : le représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest, l’Algérien Saïd Djinnit.

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Il devait venir à Conakry afin que tout le monde se mette d’accord sur les règles du jeu et la date des législatives, qui sont sans cesse repoussées depuis deux ans. Mais le 13 avril, le chef de l’État guinéen a décidé par décret de convoquer le corps électoral pour le 30 juin. Réaction immédiate d’un leader de l’opposition en colère : « C’est une vraie torpille. L’opposition guinéenne descend à nouveau régulièrement dans les rues de Conakry depuis le 18 avril. En cause ? La décision du chef de l’État, Alpha Condé, d’organiser des législatives le 30 juin.

« Mais pourquoi Alpha a-t-il signé ce décret ? » À Conakry, la question est sur toutes les lèvres. Depuis le début du mois d’avril, la tension baissait entre le pouvoir et l’opposition. Les deux parties s’étaient entendues sur le nom d’un facilitateur : le représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest, l’Algérien Saïd Djinnit. Il devait venir à Conakry afin que tout le monde se mette d’accord sur les règles du jeu et la date des législatives, qui sont sans cesse repoussées depuis deux ans. Mais le 13 avril, le chef de l’État guinéen a décidé par décret de convoquer le corps électoral pour le 30 juin. Réaction immédiate d’un leader de l’opposition en colère : « C’est une vraie torpille. Désormais, le dialogue n’a plus de sens. »

« Non, ce n’est pas du tout du sabotage », réplique un proche du président. « Depuis plusieurs semaines, Alpha Condé fait un travail de fond avec les opposants qu’il reçoit en tête à tête. Ainsi Cellou Dalein Diallo [son adversaire au second tour de la présidentielle de 2010, NDLR] qu’il a vu longuement à Nouakchott, le 25 mars dernier, en marge d’un sommet régional. Et Sidya Touré [arrivé troisième au premier tour] qu’il a rencontré à Conakry le 1er avril. Je ne crois pas que le décret du 13 avril va altérer ce dialogue de fond. Au contraire, il peut avoir un effet accélérateur dans le rapprochement des positions. »

Méfiance

Pour l’instant, le décret accélère surtout le rythme cardiaque des opposants. Le 18 avril, ils ont repris les « marches » et sont descendus en masse dans les rues de Conakry aux cris de « Alpha zéro », ou de « Du courant, sinon pas d’élections », allusion aux délestages qui continuent d’assombrir la capitale guinéenne et qui provoquent des manifestations depuis une semaine. « Nous allons continuer le combat », dit Cellou Dalein Diallo, qui annonce de nouvelles marches.

Pourquoi ce décret ? « Je ne comprends pas », glisse un diplomate en poste en Afrique de l’Ouest. « Nous sommes plusieurs à lui avoir laissé entendre qu’on ne pouvait pas commencer le dialogue par ce genre d’initiative. Mais que voulez-vous… C’est le président. »

Deux explications sont avancées. D’abord, Alpha Condé est sans doute pressé, car la saison des pluies commence fin juin et rend impossible le vote jusqu’à fin septembre. Élu en novembre 2010, le chef de l’État est déjà à mi-mandat. Il ne veut pas que des législatives reportées à 2014 coïncident avec le début de la campagne pour la présidentielle de 2015. Ensuite, il se méfie peut-être de l’ONU, car Saïd Djinnit, le facilitateur, compte venir travailler à Conakry avec une équipe d’experts qui vont mettre nécessairement leur nez dans les listes électorales. Les faucons du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG, au pouvoir) voient-ils cela d’un bon oeil ? Le 12 avril, Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’ONU, a signé une lettre annonçant au Premier ministre guinéen la venue de la mission Djinnit. Le lendemain, Alpha Condé prenait son décret.

Paradoxe

Le blocage est-il insurmontable ? Pas sûr. Le paradoxe, c’est que, malgré le décret du 13 et la manifestation du 18 avril, les positions des deux parties sont peut-être en train de se rapprocher. Bien entendu, comme l’an dernier, la principale pomme de discorde reste Waymark, la société sud-africaine que le pouvoir a choisie sans appel d’offres, en avril 2011, pour réviser le fichier électoral. Et l’opposition continue de réclamer à cor et à cri son remplacement par une autre société. Mais un diplomate proche du dossier remarque : « Les opposants savent bien qu’on ne va pas convaincre le président de changer d’opérateur. » Et l’un de ces opposants confie : « Si Djinnit avait pu faire son tour de table, on aurait pu discuter de compromis possibles sur cette affaire. » Le compromis en vue, c’est un second opérateur qui balaierait tous les jours la base de données de Waymark avec un logiciel de contrôle. « Pour empêcher une main malveillante de manipuler la nuit, il faut qu’un tiers puisse faire un back-up quotidien de la base de données et comparer le jour J avec le jour J – 1, explique un connaisseur du dossier. En fait, le problème, ce n’est pas la technique, c’est la confiance dans les hommes. »

De l’avis général, si un accord est trouvé sur l’opérateur technique qui révisera les listes, la question du vote des Guinéens de l’étranger pourra se régler assez vite. Selon la loi, ils sont électeurs. Mais pour l’instant, ils ne votent pas aux législatives. Est-ce à cause du poids de la diaspora peule ? À la présidentielle de 2010, beaucoup ont opté pour Cellou Dalein Diallo, le candidat de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG). Du coup, le RPG d’Alpha Condé n’est pas pressé de les voir participer au prochain scrutin. Mais un proche du chef de l’État finit par laisser tomber : « En cas de compromis, il n’est pas exclu qu’ils puissent voter. » Et ce conseiller d’ajouter : « Il faut penser aux investisseurs. » De fait, depuis les graves affrontements de février-mars (neuf morts à Conakry), le climat des affaires n’est pas bon, et l’Union européenne conditionne toujours une enveloppe de 175 millions d’euros à la tenue de législatives « libres et transparentes ».

 

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